L’histoire de l’idée d’«harmonie du monde», depuis les Pythagoriciens, est – dans l’esprit de Leo Spitzer – histoire de la permanence et continuité de la civilisation classique à travers les âges, jusqu’au seuil de notre monde moderne sécularisé. Elle fait son chemin en suivant les méandres des mille et un textes de littérature européenne convoqués ici, d’où monte, en un long crescendo ostinato, la musique de notre «idée du monde». Concert de langues et de citations, L’harmonie du monde, dans son absence délibérée de structure et dans le foisonnement de ses références entrelacées, est «un monument à la mémoire de l’homme» (René Wellek), et «l’un des livres les plus lumineux qu’ait pu nous offrir la culture allemande» (Carlo Ossola).
Né à Vienne en 1887, Leo Spitzer fut professeur de philologie romane aux universités de Marbourg, puis de Cologne, avant d’être destitué de son enseignement par les nazis en 1933. Contraint à l’exil, comme son confrère Erich Auerbach, il devient professeur de philologie romane à l’université d’Istanbul, à l’invitation du gouvernement de Mustapha Kemal, puis émigre aux États-Unis en 1936, où il enseigne la littérature comparée à l’université Johns Hopkins de Baltimore jusqu’à sa mort en 1960. On peut lire en français ses désormais classiques Études de style, préfacées par Jean Starobinski (Gallimard, 1970) et, plus récemment, un recueil d’Études sur le style (Ophrys, 2009).