Le gouvernement Valls avait annoncé que cet automne débuteraient les travaux de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et que pour ce faire tout ce qui y vit serait extirpé par la force. La saison avançant, la menace se fait pressante, et nous sommes plus que jamais déterminés à défendre le bocage et ses habitants, en empêchant que ne sorte de terre un ouvrage aussi inutile que nuisible. Une grande manifestation se tiendra donc sur les terres menacées de saccage les 8 et 9 octobre prochains.
Cela fait presque dix ans désormais que se joue en ces lieux une expérience unique, mêlant paysans refusant de quitter leurs fermes, locataires indéracinables désormais voisins – et bien plus encore – de toutes celles et ceux les ayant rejoints suite à l’appel des « Habitants qui résistent ». Ces quelques années ont vu se bâtir et grandir soixante lieux de vie à la place du béton et des vrombissements promis par l’État et la multinationale Vinci. Sur ces quelques 2000 hectares, c’est une véritable expérience révolutionnaire qui se construit, à l’envers des logiques de soupçon, de « sécurité », de normalisation et d’individualisme qui ont cours dans notre présent policé. Sa force se love dans son ouverture à ce qui l’entoure, dans les mille liens dont elle est tissée, qui dessinent aujourd’hui une géographie nouvelle à même de lézarder le meilleur des mondes qui nous est imposé. Au creux de cette époque enténébrée, la zad est une lueur qu’il nous incombe non seulement de maintenir, mais de nourrir afin que son feu continue de réchauffer nos espoirs.
Alors que le danger approche, de nombreux lieux proposent donc d’organiser leur défense en montrant des pans de la vie que nous défendrons et continuerons d’enrichir ici, en invitant par exemple des meuniers au moulin, des fromagers dans la laiterie, etc. Et pour la bibliothèque, ce sont à des auteurs, éditeurs ou libraires que nous faisons appel afin de la sauver d’une destruction annoncée. L’idée que les livres soigneusement mis ici à la disposition de tous soient piétinés par des CRS, brûlés par des grenades ou définitivement enfouis sous les décombres du bâtiment nous est insupportable. Parce que ces livres sont le miroir d’un monde, nous vous lançons donc un appel à venir apporter un témoignage (filmé par nos soins) de votre opposition à la destruction du bocage et à la marchandisation de l’espace, tout autant que de votre attachement aux lieux de culture menacés. Un serment prononcé à la bibliothèque les 7, 8 et 9 octobre (ou quelque autre jour selon vos disponibilités), voici une des nombreuses manières de soutenir la résistance, de lui donner le souffle et l’écho à même de faire voyager nos voix réunies. Voici qui aviverait encore davantage notre détermination à opposer nos corps aux sans-âmes qui de tout temps ont été hantés par cette volonté haïssable d’écraser ce qui nous grandit. Au milieu des fumées âcres, nous continuerons à voler le temps de lire, et si les yeux nous piquent, si les mots se brouillent, nous nous rappellerons, vous et nous côte à côte, qu’il faut à tout instant « juxtaposer à la fatalité la résistance à la fatalité ».
Durant les journées des 8 et 9 octobre, nous aurons un stand au point d’arrivée de la manifestation, et la bibliothèque sera ouverte toute la journée, afin que nous puissions nous y rencontrer.
L’équipe du Taslu, bibliothèque de la zad en construction (perpétuelle)
PS : Vous trouverez une présentation détaillée de la bibliothèque à l’adresse suivante : http://zad.nadir.org/spip.php?rubrique85