Paul Lafargue
La religion du capital
La religion du Capital — cette « farce » savoureuse de l'auteur du Droit à la paresse — publiée pour la première fois en 1887, est le compte-rendu d'un congrès international tenu à Londres, au cours duquel les représentants les plus éminents de la bourgeoisie rédigent les Actes d'une nouvelle religion pour ce Chaos qu'ils ont créé et ont décidé d'appeler « Monde civilisé ». Une nouvelle religion, susceptible non seulement « d'arrêter le dangereux envahissement des idées socialistes », mais capable de donner à ce monde chaotique et capitalistique une forme au moins apparemment définitive. Il faut bel et bien au Capital un Dieu propre, qui « amuse l'imagination de la bête populaire ».
Petit-fils d’un catholique bordelais émigré à Cuba et marié à une mulâtresse, du côté de son père, et d’un juif français lui aussi exilé aux Caraïbes, marié à une indienne, du côté de sa mère, Paul Lafargue (1842-1911), épousa Laura Marx, fille de Karl, lequel ne fut jamais tendre avec celui qu'il appelait son ‘demi-gendre', bien qu'il ne fut pas « possible de ne pas le trouver sympathique », écrivait Marx, avant de s'exclamer: « Lafargue, le dernier des bakounistes que le diable l’ emporte » (lettre à Engels du 11 novembre 1882). Membre de la Première internationale, il participe à la Commune de Paris, s'enfuit en Espagne puis au Portugal, est incarcéré à la prison de Sainte-Pélagie pour propagande révolutionnaire et y rédige le livre auquel son nom reste attaché: Le droit à la paresse (1883). Il mettra fin à ses jours à Draveil, en même temps que sa femme, justifiant son geste par un mot: « Sain de corps et d'esprit, je me tue avant que l'impitoyable vieillesse qui m'enlève un à un les plaisirs et les joies de l'existence et qui me dépouille de mes forces physiques et intellectuelles ne paralyse mon énergie, ne brise ma volonté et ne fasse de moi une charge à moi et aux autres.»