André Neher
Anna Waisman
Cette chose indispensable qui reste invisible et que je sais voir et entendre
Correspondance 1962-1988
« Ces merveilleuses lettres, cher André Neher, sont le symbole de toutes les fraternités à tous les stades et degrés de l’homme. Elles sont les clés de l’avenir du monde ; elles savent si bien synthétiser par la pureté, l’équilibre, l’harmonie, que le respect et la considération sont primordiaux pour la survie de l’espèce humaine. Me croirez-vous si je vous disais que nous nous parlons elles et moi un langage combien secret, exclusif, fait de subtilités, de complicité et d’amour ? »
Farouchement autodidacte, Anna Waisman (1928-1995) a pris la sculpture à bras-le-corps à partir de la fin des années cinquante, pour composer, pendant plus de trente ans, les « lettres » personnelles d’un alphabet hébraïque, d’où elle a fait surgir les infinités de sens contenues dans ses formes, ses repliements, ses envolées. À ces « objets abstraits » que sont les lettres hébraïques, « visibles et palpables » d’un côté, « expression d’une réalité spirituelle fondamentale » de l’autre, Anna Waisman confie toute son intelligence du judaïsme et sa foi intuitive et profonde. « J’ai découvert le judaïsme en sculptant les lettres hébraïques dans la pierre », écrit-elle, et le dialogue qu’elle établit, à partir de 1962, avec André et Renée Neher, la conforte dans ses intuitions, la rattache à un judaïsme ouvert et recréé, la rassure dans le chemin qu’elle parcourt le long des vides et des pleins d’un alphabet qu’elle découvre et comprend en même temps qu’elle le sculpte. Un document exceptionnel d’une amitié stellaire entre l’artiste Anna Waisman et l’homme de pensée, André Neher.
Née à Strasbourg en 1928, Anna Waisman renonce à la danse, où elle excellait, pour se consacrer à la peinture et à la sculpture à partir de la fin des années cinquante. Elle s’installe d’abord sur les berges de la Seine, entre 1959 et 1961, et dans ce véritable atelier à ciel ouvert, elle sculpte les pierres du Viaduc d’Auteuil en démolition. Sans instrument de travail, elle taille ces pierres avec des objets rudimentaires, un tournevis et des tenailles. À la naissance de son fils Samuel Blumenfeld en 1963, sa pratique artistique s’enrichit du dessin et de la peinture. Par la suite, elle exposera à Paris, à New York et à Jérusalem, et certaines de ses sculptures monumentales sont visibles à Paris (Commune libre de Montmartre) ou à Sarcelles, où elle réalise en 1981, le Mémorial des martyrs juifs victimes de la barbarie nazie. Elle disparaît en 1995, et laisse plus d’un millier d’œuvres. (Photo © Jacky Azoulai)
André Neher (1914-1988) a marqué profondément les études juives en France, depuis Amos. Contribution à l’étude du prophétisme (1950), jusqu’aux recherches sur le Maharal de Prague et à l’enseignement de toute une vie, de Strasbourg à Jérusalem, aux côtés de Renée Neher-Bernheim (1922-2005). Depuis sa disparition, son œuvre, traduite dans de nombreux pays, suscite un intérêt croissant. Les Éditions de l’éclat ont publié en 2021 un texte inédit : Critique biblique et tradition juive, édité et présenté par Enrico Lucca. (Photo DR)
Édition établie et présentée par Sibylle Blumenfeld
Avant-propos de Carine Brenner et Renée Neher et préface par Nelly Hansson
Richement illustré et imprimé en couleurs le livre reproduit plus de soixante-dix œuvres d’Anna Waisman, évoquées tout au long de la correspondance.
Lire l'article de Samuel Blumenfeld dans l'Arche (numéro de mars)
Lire l'article de Juliette Cerf dans Télérama (TTTT)
Entretien avec Sibylle Blumenfeld sur Akadem
Talmudiques sur France Culture avec Sibylle et Samuel Blumenfeld
Critique biblique et tradition juive Héritages d’André Neher